25/10/2012

Grégory Gadebois. Acteur, tout simplement.

Grégory Gadebois sur scène. cr. ARTCOMAR
Charlie est simple. Entendez simplet. Personnage principal du texte de Daniel Keyes Des fleurs pour Algernon - Algernon est une souris de laboratoire -, il prend chair sur scène par le truchement de Grégory Gadebois, César du meilleur espoir masculin 2012. Une heure et demie durant, le comédien prête sa corpulence terrienne et son humanité à ce pauvre gars, victime d’une expérience supposée booster son Qi.

Transformiste. Si le texte est efficace, l’adaptation du roman par Gérald Sibleyras est une mécanique dont on voit néanmoins un peu trop les rouages, c’est à l’interprétation sans complaisance de l’acteur que tient  le sel de la pièce. D’un effleurement du nez, une raideur des poignets, un regard glissé sous la paupière, Grégory pose le personnage de Charlie. Lorsque l’opération semble réussir, c’est imperceptiblement que le timbre de sa voix se transforme, son corps se redresse, son regard s’allume d’intelligence. Mais ne cherchez pas l’effet. Il semble lui-même surpris par ce réveil de la conscience. Puis, inexorablement, poursuit sa courbe de Gauss. Les ficelles, les trucs d’acteurs, la facilité, ce comédien exigeant ne doit pas connaître. Certes le décor et la mise en scène cliniques lui sont des supports. Mais je gage qu’assis sur le lit d’une chambre d’ado décorée de posters pourris, il serait tout aussi étonnant. Alors la souris, on s’en f…  Les fleurs c’est pour Grégory.

- Des fleurs pour Algernon d’après l’œuvre de Daniel Keyes est à l’affiche du Théâtre Hébertot, 78, boulevard des Batignolles, Paris 17e. 

18/10/2012

Le Canton. Les baguettes sans les paillettes !


A Saint-Germain-des-Prés, entre les attrape-touristes et les usines à gogos « so hype » dont la cuisine n’a de remarquable que le prix, il devient de plus en plus difficile de trouver un petit restau digne de ce nom. Créé en 1958 par la famille Lai, dont le père et fondateur était un Chinois du Vietnam,  Le Canton fait de la résistance.
Juste équilibre. Cette table asiatique dont la cuisine s’est aujourd’hui métissée régale les éditeurs, artistes et autres habitués du quartier de ses spécialités vietnamiennes ou chinoises : savoureux raviolis vietnamiens (mon plat préféré), Pho parfumé, Bo bun généreux, salade de bœuf toute en légèreté, crevettes au sel et poivre… Simple et d’une fraîcheur indéniable, la cuisine sans chichi y est plus qu’honnête, l’ambiance animée à toute heure, le service bon enfant - les Lai mère, fils, belle-fille et neveu y officient toujours – et le cadre sympathique. Aux beaux jours, le patron sort quelques tables sur le trottoir de la minuscule et calme rue Gozlin. Agréable.

Restaurant Le Canton – 5, rue Gozlin, Paris 6 – Tél. 01 43 26 51 86. Ouvert tous les jours excepté le dimanche.

11/10/2012

Au théâtre, ça ne tourne pas toujours rond


Fellag sur scène et aux fourneaux du Rond-Point

Passez-moi le jeu de mots facile,  je n’ai pu y résister. Mais le théâtre du Rond-Point se permet vraiment tout depuis que Jean-Michel Ribes en a pris la direction voici dix ans. Et c’est un plaisir de voir cette machine à culture casser le train-train intello-bobo et l’esprit de sérieux de certaines grandes scènes subventionnées.
Grands écarts. Tenu par un seul principe, celui de jouer les auteurs vivants, la programmation mélange allègrement les « chapelles ». Au début de l’année, Jean-Claude Grumberg, un habitué du lieu, vint ainsi notamment présenter la captation de sa création de l’Atelier au théâtre de l’Odéon (1979). Emouvant. Actuellement, c’est au réjouissant Fellag de mettre en perspective nos faits de racisme ordinaire à sa manière : il cuisine sur scène un couscous géant autour duquel Français et Algériens se réconcilient en rigolant. L’ambiance est (aussi) dans la salle. Dans un autre genre, il y a un gouffre entre l’humour trash de Gaspard Proust (en décembre) et la fantaisie toute en poésie de Jacques Gamblin et son Tout est normal, mon coeur scintille, à l’affiche en février 2013. Un spectacle à ne pas rater.

Ça ne se fait pas ? Tant mieux. Le Rond-Point ose aussi explorer de nouveaux univers. Après avoir lancé des ponts entre les théâtres publics et privés en coproduisant certaines pièces avec Le Marigny, Jean-Michel Ribes et Pierre Notte, conseiller littéraire et auteur associé du Rond-Point ont invité cet automne des compagnies amateurs. Gonflé. D’autant qu’ils ne se sont pas contentés  de leur proposer les miettes d’un spectacle joué et rejoué par des pros et ont passé commande auprès de sept auteurs (dont Marie Nimier) de pièces courtes autour d’un thème inspirant : le lit. Les compagnies triées sur le volet se sont produites les 26 et 27 octobre derniers.
- Infos et programmation complète. www.theatredurondpoint.fr